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After a year in Boston, entering an happy Apocalypse
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7 novembre 2010

QE2

Deux articles intéressants dans Le Monde sur les Etats-Unis: une interview de Ariana Huffington, auteure de "Thirld world America" qui décrit l'état de décrépitude des USA et une interview d'un sociologue américain (R. Sennett) qui décrit l'impact de la désagrégation des parcours professionnels sur les conduites électorales et plus généralement sur le rapport individu/société aux USA.

Je crois que l'on mesure mal ici en Europe l'ampleur de ce qui est en train de se produire de l'autre coté de l'Atlantique. Le choc économique qui a frappé les Etats-Unis est sans commune mesure avec les récessions antérieures, y compris celle de la fin des années 70. Si les images de la grande dépression des années 30 avec leurs queues devant la soupe populaire et l'exode des paysans pendant le dust bowl ne sont plus d'actualité, le choc est tout à fait comparable par son intensité.

QE2_world_cruiseL'actuel gouverneur de la Fed, Ben Bernanque, ne s'y est pas trompé. L'annonce d'un nouveau plan de rachat d'obligations américaines pour 600 milliards de $ juste après le résultat des élections de midterm est un signal clair: même si le pouvoir politique est paralysé par l'opposition démocrates/républicains, la FED fera tout ce qu'elle peut pour soutenir l'économie. 

Ce mouvement de la FED, en apparence purement technique, est ainsi loin d'être anodin. D'une part, il rappelle au monde combien la situation outre Atlantique est inquiétante (n'en déplaise à ce que l'on entend dans le petit monde politique parisien, la crise est très loin d'être finie). D'autre part, elle signifie que les USA viennent de dire au reste du monde "America first"...

Ce n'est pas surprenant mais dans le contexte actuel, on voit déjà se dessiner les aspirants Barbares de demain, ceux qui ne rèvent que de devenir l'Empire à la place de l'Empire. Au premier rang, la Chine évidemment qui, pendant que Hu Jintao se régalait de courgettes et poivrons farcis dans le vieux Nice, faisait pression sur nombre d'états européens pour qu'ils n'envoient pas de représentation diplomatique à la remise du prix Nobel de la Paix 2010 et en parallèle prenait la tête d'une croisade contre le quantitative easing et contre la tentative américaine d'ouvrir des discussions sur les déséquilibres du commerce mondial. Ainsi, un des négociateurs chinois au G20 déclarait (source: Financial Times du 5/11/2010):

"We believe a discussion about a current account target misses the whole point. If you look at the global economy, there are many issues that merit more attention – for example, the question of quantitative easing.

Pour comprendre cette réaction, il faut analyser les conséquences de la décision de la FED sur l'économie chinoise. C'est ce qu'a fait Charles Dumas dans son blog. On sait qu'avec la crise économique, l'interêt objectif des USA est de diminuer le déséquilibre commercial avec la Chine... en gros, porduire du Made in America au lieu de vendre du Made in China. Or un des moteurs de ce déséquilibre est la sous évaluation de la monaie chinoise par rapport au $ et ce point revient de manière récurrente dans les demandes américaines aux autorités chinoises, lesquelles s'obstinent à refuser. Dans ce contexte, le mouvement de la FED constitue un passage de la demande polie à la coercition soft. 

En opérant ce mouvement, la FED va transférer sur l'économie chinoise le cout du maintient de la parité relative yuan/$. En effet, l'opération de quantitative easing, en provoquant une appatition de liquidités aux USA va faire baisser le $. Maintenir le yuan au meme niveau va mécaniquement se traduire par une inflation croissante en Chine dans un contexte où son économie est déjà au bord de la surchauffe. A cela se rajoutera le risque de bulles spéculatives en Asie générées par cet afflux de $ frais, bulles qui en éclatant ne manqueront pas de causer des dégats aux économie émergentes, comme le souligne China Daily. Cet excès d'investissement en période de ralentissement de la demande extérieure se traduira à un moment par un ralentissement de l'activité économique en Chine. Certains voient même une division par deux du taux de croissance. Ces effets de l'opération de la FED pourraient être contrebalancés par une hausse de la consommation intérieure chinoise mais dans une économie déjà si proche de la surchauffe, cela devrait causer un décollage de l'inflation. In fine, ce sont donc les nouvelles classes moyennes chinoises qui vont donc payer la facture en voyant leur épargne fondre! De quoi mettre un peu la pression sur les dirigeants chinois dont le pouvoir tient sur le deal "Laissez nous vous diriger, nous vous laisserons vous enrichir."

Disons le: la déclaration de guerre économique soft par la FED n'a rien de surprenant.

La tension montait de plus en plus depuis quelques années entre la Chine et les Etats-Unis sur le thème du rééquilibrage. Les officiels chinois ont probablement tiré sur la corde un peu trop et pensé que l'administration Obama, empétrée dans la crise, n'irait pas leur chercher des noises. Les gesticulations autour de la mer de Chine cet été et l'utiliisation des exportations de terres rares comme outil de pression politique ont manifestement été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase.

Dans ce contexte, je ne suis pas sur que les courbettes de Carla et Nicolas devant Hu Jintao soient le signe d'une grande clairvoyance politique...

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Commentaires
P
Oui je suis d'accord, et quand on lit entre les lignes de son texte, on voit qu'il est très inquiet. Pour être franc, je partage une partie de son diagnostic... Voir mon prochain post sur le sujet.
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P
Krugman n'est impressionne ni par l'ampleur du plan de la FED, ni par les critiques etrangeres.<br /> Voir sa chronique d'aujourd'hui dans le quotidien de reference :<br /> <br /> http://www.nytimes.com/2010/11/08/opinion/08krugman.html?partner=rssnyt&emc=rss
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After a year in Boston, entering an happy Apocalypse
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