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After a year in Boston, entering an happy Apocalypse
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31 décembre 2011

Je vous l'avais bien dit...

C'est une phrase que l'on va entendre souvent et que je pourrais répéter bien des fois... Mais sur ce coup là, j'avais senti les emmerdements venir.

Comme le décrit un article du Monde, le passage à l'autonomie des universités entraine un certain nombre d'effets secondaires indésirables en période de crise... En effet, les universités devenues autonomes doivent faire face à une augmentation de leurs charges vu qu'elles doivent maintenant assurer en interne un certain nombre de choses dont, par exemple, l'édition des bulletins de paye. Certaines ont choisi de disposer de compétences élargies de manière à assurer la gestion de leurs batiments. Or tout cela a un cout... Il y a un cout direct lié aux embauches de personnel administratif pour assurer les taches de gestion et un cout indirect lié à la remise aux normes des batiments qui s'avère souvent nécessaire (cf notre expérience à l'ENS Lyon)

Vous me direz que les dépenses liées à des taches qui existaient auparavant comme l'édition des fiches de paye sont supprimées à un autre  niveau (le rectorat) mais alors que mutualiser permet de faire des économies d'échelle, dans le cas présent, on démutualise... Le bilan net risque donc d'être négatif. Ce à quoi on pourrait répondre que les universités y gagnant en réactivité, flexibilité et capacité d'embaucher des personnels correspondant mieux à leur besoin, on améliorera le service rendu. 

Tout ceci est vrai sous réserve que le flux d'argent disponible augmente suffisemment et que les universités fassent de bons choix dans leur affectation. Et cela n'a rien d'évident...

En fait, j'ai l'impression nette que quand le flux d'argent rentrant dans un système universitaire augmente, sa tendance naturelle est à l'expansion: on lance de nouveaux projets de recherche, on ouvre de nouvelles filières etc. Le hic est que si cela se fait toutes choses égales par ailleurs, on peut se retrouver avec une situation tout aussi tendue mais sur un ensemble un peu plus gros. C'est un peu ce que j'ai observé avec l'ANR, l'ERC et les mécanismes de contrat: cela pousse à une inflation dans le nombre d'activités qu'ensuite on doit arrêter lorsque le régime de croissance exponentiel cesse voire que les crédits diminuent. Je ne serai pas surpris que la même chose se produise avec la gestion des batiments ou sur d'autres postes de dépense... 

C'est précisément ce que résume très bien le président de l'université de St. Etienne: 

"Dans mon université, le budget a augmenté de 25 % sur la période.Mais cela correspond notamment à des missions nouvelles, comme le plan Réussir en licence. Si l'on s'en tient au budget de fonctionnement, l'augmentation est faible, voire nulle. Elle ne couvre pas, par exemple, le coût de l'énergie pour chauffer les amphis... En outre, si la hausse de la dotation de l'Etat a été forte les premières années, l'effort a aujourd'hui beaucoup ralenti. Cela entraîne des difficultés de gestion qui remettent en question le projet politique de l'autonomie, car nous n'aurons plus à gérer que les inconvénients sans avoir la capacité de nous développer. Or c'est précisément cela qui justifie le fait que nous devions assumer les charges. L'enjeu de l'autonomie, ce n'est pas de faire des fiches de paie !"

Nul doute qu'un régime de croisière finira pas être trouvé mais à mon avis, on a voulu aller trop loin, trop vite et sans les moyens de fluidifier les choses. La crise qui arrive, et qui à mon avis va bouleverser profondément les choses en matière d'accès à l'enseignement supérieur, risque fort d'amplifier considérablement les difficultés. Nous risquons là encore de voir les effets d'une confrontation entre la recherche d'une croissance exponentielle d'une part et la finitude des ressources d'autre part. Malthus est décidément partout...

En cette fin d'année 2011, je prends donc un pari: avant 2022, au moins une université française importante frisera la cessassion de paiement des salaires. Si tout se passe bien, elle sera sauvée par l'Etat... et sinon...

PS: Ceux et celles qui suivent ce blog depuis longtemps se souviendront que j'avais déjà posé ce problème de manière très explicite dans un post de Novembre 2010... La nouveauté c'est que maintenant, ca fait la une du Monde.

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Commentaires
B
Arrrrg ! S'il y a bien une grosse université Française qui a déjà de gros souci avec ses finances c'est la mienne, alors si tes analyses sont correctes (et dans le domaine de l'ESR c'est souvent le cas)...
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After a year in Boston, entering an happy Apocalypse
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