Interrogations...
Il y a maintenant 17 ans, autant dire une éternité, je lançais avec quelques autres un mouvement sur Internet destiné à changer les formations doctorales. C'est quelque chose dont j'ai déjà parlé sur ce blog (a lire: un bilan complémentaire et plus subjectif de nos actions) et qui, à l'époque était vraiment novateur. Ca serait un peu long de raconter le pourquoi et le comment ici mais je voudrais partager ici une réflexion d'une personne qui a également participé dès le commencement à cette aventure car elle résule parfaitement une des questions récurrentes que je me pose dans ce blog:
"En fait, j'aimerais retrouver de ce temps, cette clarté et cette certitude de ce qui est à faire pour changer quelque chose! Aujourd'hui je vois tant de choses, tant d'énergies partir dans tous les sens avec cette impression qu'il y a une autre voie, que je ne vois pas et que j'espère. D'autant plus que je crois aussi qu'il est raisonnable d'agir avec les moyens que l'on a plutôt que de rester phosphorer des années (sauf si c'est l'unique talent que la vie nous a donné)."
La semaine dernière, quand je suis passé sur Paris, j'ai logé chez un des lecteurs (et commentateurs) régulier de ce blog et on s'est posé exactement la même question. Quand on s'est lancé dans l'aventure HotDocs et ses spinoffs, les choses étaient claires et j'avais l'intime conviction que nous allions réussir à changer des choses. Ce fut le cas dans les grandes lignes et jusqu'à un certain point qui dépassa nos espérances initiales...
Mais autant j'avais cette clarté et cette certitude de ce qui est à faire pour changer quelque chose à l'époque, autant ce n'est plus le cas actuellement...
Je ne parle évidemment pas des mêmes problèmatiques (enseignement supérieur et recherche) mais d'autres problèmes bien plus importants comme les crises énergétiques, climatiques et économiques qui se profilent à l'horizon... Les enjeux sont clairs, les données sont là, les problèmes qui se posent sont de plus en plus clairement formulés mais nous avons tous le sentiment de ne pas voir clairement le ou les chemins qui permettent de construire le monde d'après. En fait pour être franc, je commence même à douter que l'on puisse éviter à l'enseignement supérieur et à la recherche française de subit le contrecoup des turbulences qui s'annoncent.
Vous me direz qu'entre sauver les doctorants français (dix mille personnes) et sauver la civilisation humaine (un à dix milliards de personnes), il y a un saut de complexité assez conséquent... Mais ne vous méprenez pas: je n'ai pas la prétention de sauver la civilisation humaine, je suis juste frappé par le fait que nous visons un temps où le diagnostic se précise dramatiquement mais qu'il me semble qu'aucune voie ne se dégager pour éviter ou limiter l'impact des crises qui s'annoncent. En gros, on va dans le mur de plus en plus nettement mais on voit de moins en moins comment l'éviter.
C'est sans doute cela la marque d'une véritable singularité historique (ou d'une rupture paradigmatique majeure): quand un monde s'éffondre, on ne voit pas comment faire la transition vers le monde nouveau qui suivra...
Cela me ramène exactement au post que j'écrivais en avril 2012 et qui s'intitulait "Renaissance"... Il est peut être temps d'en faire un point de départ d'une réflexion sur les voies qui nous amèneront au monde d'après. Sous réserve que certains et certain(e)s veuillent bien m'accompagner dans cette exploration...