Bedrooms of the fallen

Chaque samedi, dans le New York Times, un diaporama. Mais ce samedi 20 mars, il avait une force peu commune: de simples photos de chambres américaines. Sauf qu'il s'agissait des chambres de soldats américains morts en Irak ou en Afganisthan. Des chambres on ne peut plus ordinaires photographiées en noir et blanc par Ashley Gilbertson, un photographe de guerre américain connu pour sa couverture de ces guerres récentes.

Il y a quelque chose d'exceptionellement fort dans ces images: tout semble normal sauf que l'occupant de la chambre ne reviendra jamais, emporté par la tourmente géopoligique de ce début de XXIème siècle.

Au delà de la prouesse photographique (car c'en est une: imaginez vous un instant aller photographier une seule de ces chambres), la parution de ces images aujourd'hui a un coté vertigineux. De l'autre coté de l'Atlantique se déroulent les dernières tractations de boutiquiers en vue du vote sur la réforme de la santé d'Obama tandis qu'ici en France, on s'apprète à battre un nouveau record d'abstention pour les régionales.

Au milieu de ces évènements, ces images viennent nous rappeler que rien n'est jamais éternellement acquis et que la démocratie que nous instrumentalisons avec tant de facilité ou à laquelle trop souvent nous tournons le dos en allant à la pèche est encore ce qui est le plus à même de nous éviter de nouvelles chambres vides. A condition d'y croire, d'avoir un minimum de culture et d'éducation et enfin de ne pas sombrer dans le cynisme. 

Depuis aussi longtemps que je me rappelle, chaque génération croit qu'elle ne vivra qu'une longue marche vers le progrès et l'arrivée dans un monde meilleur. Depuis le siècle dernier, de Cartier-Bresson et Capa à Gilbertson en passant par Salgado, les maitres du photojournalisme nous montrent que la fin de l'Histoire n'est pas pour demain. 

PS: Pour voir le résultat final de ce projet, visitez le site Bedrooms of the Fallen. A voir également le site personnel de Ashley Gilbertson.