Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
After a year in Boston, entering an happy Apocalypse
Archives
Derniers commentaires
13 février 2010

Tous les matins du monde

En ces temps de blingbling et de surexcitation névrotique, le lourd manteau neigeux qui s'est abattu sur notre douce France m'a semblé une bonne occasion de faire une après midi cinéma@home. Du coup, je me suis regardé "Tous les matins du Monde" par un dimanche après midi enneigé et brumeux de Janvier.

tous_les_matins_du_mondeIl y a quelque chose dans le film, une harmonie entre l'image, la musique et le scénario qui m'avait vraiment marqué à l'époque de sa sortie. Plus de 15 ans après, l'impression est toujours aussi forte. 

En regardant les bonus du DVD, j'ai découvert une interview d'Alain Corneau (le réalisateur), de Jordi Savall (qui a interprété la musique) et de Yves Angélo (directeur de la photographie) qui expliquent comment le film est né d'une démarche collective. Au départ était le rève d'Alain Corneau de faire un film sur le Baroque. Le scénario est sorti d'une collaboration avec Pascal Quignard qui suggéra de travailler sur la rupture entre deux siècles. D'un coté le personnage de Sainte Colombe, violiste janséniste exigeant plongé dans la musique du XVIIème et de l'autre son élève, Marin Marais, qui fera carrière au service du Roi et au sein de la Cour.

Au service de l'histoire se trouve la musique: le violiste actuel Jordi Savall a donc sélectionner les oeuvres musicales qui composent le film et les interpréter. Comme il l'explique, le défi était d'interpréter les morceaux en se plaçant dans l'état d'esprit de chaque personnage au moment où il l'interpréte. Le projet ne s'est donc vraiment concrétisé qu'à partir du moment où la musique a été enregistrée, en fait avant même le tournage. Et la bande son est une merveille.

Les lieux de tournage firent également l'objet d'un choix attentif de manière d'une part à fournir le cadre approprié à l'histoire et d'autre part, de manière à mettre l'équipe de tournage dans l'ambiance. Ainsi le tournage des scènes dans la maison de Sainte Colombe eut lieu dans un manoir un peu reculé et immergea l'équipe dans une athmosphère de retraite spirituelle très "janséniste".

37_005_200Les éclairages furent très soignés, s'inspirant de la peinture de l'époque. En particulier des oeuvres de Lubin Baugin, peintre français assez peu connu du 17ème, connu notamment pour ses natures mortes. Le tableau ci contre résume à lui seul un certain nombre d'éléments du film. 

Bien sur on y trouve l'atmosphère visuelle et la sobriété volontaire dans laquelle s'enferme Sainte Colombe. Mais ce tableau est aussi emblématique de la fin de la Renaissance par sa perspective. C'est tout l'ancrage de Sainte Colombe dans un passé en train de disparaitre qui est résumé par ce choix esthétique. Et l'harmonie entre éclairages, rythme musique et personnages est vraiment parfaite.

Autre coup de génie du film: avoir fait jouer un même personnage à deux ages différents par le père et le fils Depardieu. Deux grands acteurs qui, alliés à la composition de Jean-Pierre Marielle ont réussi à parfaitement rendre cette histoire Maitre/Elève sur fond de changement d'époque qui constitue la trame profonde du récit. 

Par le truchement de cette histoire et par l'immersion dans des codes esthétiques lointains, c'est au thème de la transmission que Tous les matins du Monde nous invite à réfléchir. En ces temps de débats nauséabonds sur l'identité nationale, il n'est pas inutile d'éprouver une fois encore combien une histoire universelle et donc mille fois racontée, magnifiée par des musiques, des peintures et des batiments venus d'un passé souvent considéré comme poussiéreux (y compris par notre actuel président) ont su émouvoir des gens de toutes cultures et dans de nombreux pays. Bref, un grand film.

Publicité
Commentaires
D
Effectivement ce film plein d’ambiance, qui dans sa partie musicale, dans ses effets photographiques de clairs obscurs et par ses interprètes jouant très juste avec le talent qu'on leur connaît, ne peut qu'émouvoir le spectateur.<br /> Il y a cependant un petit bémol: Pourquoi montrer les testicules d'un Guillaume Depardieu aujourd'hui disparu, ou le sexe sauvage de Mademoiselle de Ste Colombe, serait-ce pour faire quelques entrées supplémentaires en comptant sur du bouche à oreilles hypothétique... ?<br /> Serait-ce une suggestion du producteur ou simplement de l'exhibitionnisme de commande ?
Répondre
After a year in Boston, entering an happy Apocalypse
Publicité
Publicité