Energie: malicieuse est la nature (3)

Nécessaire complément de mon post précédent: des ordres de grandeur sur ce que nous mobilisons comme énergie dans les divers aspects de notre vie quotidienne...

Je ne prétend pas être exhaustif et surement pas au même niveau que Jean-Marc Jancovici dont vous pouvez aller consulter le site Manicore.com, mais je vais juste commencer par une question toute simple:

Un chez soi, ca nécessite combien d'énergie de manière directe ? 

Poser cette question, c'est réfléchir au chauffage, à l'eau chaude et aux consommations des appareils électriques dont on dispose. Il se trouve que j'ai fait cette analyse pour chez moi à partir de mes factures de gaz et d'électricité. En gros, à deux dans un appartement d'environ 90 mètres carrés, on consomme entre 15 000 et 20 000 kWh par an.

Par personne cela fait 7500 à 10000 kWh par an. Par mètre carré, entre 170 et 220 Wh par an. 

Convertit en équivalent pétrole, cela fait de l'ordre de 1500 à 2000 kg de pétrole par an soit 750 à 1000 kg de pétrole par personne et par an. Pour obtenir l'émission de CO2 correspondante, multipliez en gros par trois!

Cela représente en moyenne 40 à 50 kWh par jour mais évidemment cette moyenne est trompeuse. En effet, la plus grande partie de cette consommation d'énergie est due au chauffage! Il faut donc s'attendre à ce qu'en hiver, mon apparement nécessite peut être près du double soit environ 100 kWh chaque jour. Ceci correspond aux 10 litres de pétrole de mon post précédent! 

On voit donc que dans la problématique du stockage d'énergie pour un logement, les deux seules solutions susceptibles d'apporter une réponse "renouvelable" à un tel besoin sont d'une part le bois de chauffage et d'autre part le solaire thermique (ballon d'eau chaude). Pas très pratique en appartement mais jouable en maison ou en petit immeuble construit pour.

Mais au delà de mon cas personnel, qu'en est t'il de manière plus générale ? Est ce que les autres "chez soi" ont la même consommation énergétique ? Qu'est ce qui influe sur la consommation énergétique d'un logement ?

La réponse est contenue dans le récent rapport de l'observatoire du bilan carbone. Il en ressort que les chiffres que je donne sont typiques des ordres de grandeur observés pour le logement et que la prépondérance du chauffage du foyer est universelle: environ 80 % et 20 % pour le reste, indépendemment du foyer (taille, revenus).

Ce que nous apprend ce rapport c'est que ce qui joue vraiment, c'est le nombre de personnes dans chaque foyer! Ainsi le bilan carbone moyen du logement obtenu par cette étude est de 3760 kg de CO2/an pour les personnes seules, 1834 pour les foyers de 2 personnes, 1609 pour 3, 1139 pour 4... C'est une division par deux ou trois!

Première leçon à retenir donc: le "toujours plus par personne" en matière de logement est l'ennemi des économies d'énergie.

Maintenant, quelles sont les mesures techniques qui pourraient permettre de diminuer cette consommation ?

En premier lieu, l'isolation thermique. C'est le grand chantier à mettre en oeuvre!

Ainsi les batiments à basse consommation sont supposés consommer 50 Wh par mètre carré et par an soit typiquement le quart de ce qu'un logement pas trop mal isolé arrive a faire actuellement. Avec une telle consommation, le chauffage solaire devient encore plus intéressant au sens où il peut fournir une partie significative des besoins. Et si la maison est bien isolée, elle est moins sensible aux aléas climatiques (elle stocke). Enfin pour compléter et pallier aux aléas climatiques, en maison individuelle ou en immeuble, le mieux est probablement un appoint par une chaudière à granules de bois.

On peut évidemment gagner encore par une amélioration des appareils électroménagers, une optimisation des éclairages (basse conso, LED, éclairages naturels par les ouvertures etc), la programmation jour/nuit du chauffage, des veilles qui consomment presque rien voire une programmation de coupures prise par prise... Toutes ces améliorations techniques qui arrivent peu à peu joueront à la marge (encore que) mais les petites rivières font les grands fleuves! J'entends déjà mes amis écolos ronronner devant ce discours... 

Le point important est que l'impact d'une isolation du bati ancien et de diverses améliorations techniques serait macroscopique. D'après Jancovici, l'isolation des batiments anciens pourrait permettre de diminuer la consommation nationale d'énergie de 10 % à 15 %. Cela semble peu mais c'est entre 30 et 50 % de l'énergie consommée pour le confort des logements qui serait ainsi économisée. Et cela correspond à la moitié de l'impact énergétique du parc automobile français! Si on isolait aussi les lieux de travail et si on recouvrait massivement au solaire thermique (tant pis pour l'esthétique des toitures) et à des techniques de climatisation par puits canadien, le gain pourrait même être supérieur.

Ensuite pour aller plus loin, il faut toucher aux habitudes. 

Bien sur, éteindre les lumières quand on quitte une pièce, les appareils que l'on utilise pas, prendre des douches au lieu de bain, vivre en pull plutot qu'à poil chez soi, sortir les plaids devant la télé, ca fait partie des choses à faire. 

Mais le gros facteur c'est le nombre de personne par foyer ainsi que le nombre de mètres carrés par personne. Là, ca va moins faire ronronner dans les chaumières car concrètement cela veut dire adieu au rève de la grande maison de 200 mètres carrés pour 4... En clair: bonjour la colocation et les petits appartements, de préférence en immeuble.

Ca veut dire aussi que pour bien faire, le départ des enfants devrait être l'occasion de changer de foyer. On est loin de l'image actuel des retraités aisés, restés dans leur grande maison qui recoivent toute leur smala le week end. La vertu écologique, c'est les retraités dans des logements de petite taille à qui leurs enfants rendent éventuellement visite en allant à l'hotel ou bien qui vont dormir sur le canapé de leurs enfants. Ca ne fait pas très "trentes glorieuses" mais comparé à l'époque pré-industrielle où l'aieul avait juste son banc près de la cheminée, cela n'est déjà pas si mal.

Bref, tout cela pour dire que la vertu écologique ce n'est pas seulement crier haro sur le nucléaire... Comme la discussion sur le logement le montre, c'est à une véritable réflexion sur notre mode de vie que le problème de l'énergie nous engage!

Dans les prochains posts, je discuterai d'autres aspects comme le transport (que fait t'on avec 10 litres d'essence ?) ou encore la consommation de bien manufacturés. Et là aussi, vous verrez que ce n'est pas si simple...

PS: Non ce n'est pas moi sur la photo. Mais j'ai un plaid très chouette bien que sans manches.