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After a year in Boston, entering an happy Apocalypse
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19 décembre 2008

De la révolution conservatrice...

Assez étrangement, c'est l'élection d'Obama qui m'a fait avancer dans cette réflexion... Finalement, quand on regarde l'Angleterre et les Etats-Unis ou même l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne, chacun de ses pays à vécu une forme de " révolution conservatrice. Après la seconde guerre mondiale, les pays européens ont mis en place système économique et sociale comprenant une protection sociale collective forte et des mécanismes de redistribution des richesses de manière à permettre l'émergence d'une classe moyenne nombreuse et capable de générer une croissance durable. En Europe, il s'agissait d'instaurer la paix sur le continent et cela impliquait de rompre avec les modèles de société de l'avant-guerre, profondément inégalitaires et générateurs de crises dévastatrices. En ce qui concerne les USA, c'est le New Deal Roosveltien qui a marqué ce basculement. economist Mais après l'équivalent de deux générations, chacun de ces pays a remis en question ce modèle: dans les années 80, Reagan et Thatcher marquèrent une rupture sociétale dans leurs pays respectifs. Réduction du périmètre d'action de l'état, déconstruction de l'état providence et augmentation exponentielle des écarts de rémunérations (voir l'étude de Piketty et Saez sur les hauts revenus aux USA) furent les principales caractéristiques de cette révolution appelée "libérale" . Cette vague a fini par toucher d'autres pays dans les années 90: l'Allemagne durant le mandat Schröder (lois Hartz), l'Italie sous la férule de Berlusconi, l'Espagne avec Aznar. Et notre hyperprésident actuel apparait comme l'artisan de cette rupture dans notre pays. Evidemment on peut se demander pourquoi si tard chez nous. Je n'ai pas d'explication lumineuse mais je vois plutot cela comme un concours de circonstances. Au milieu des années 80, Chirac et les partis de droite revendiquaient explicitement une proximité avec le courant "libéral" thatchero-reaganien. Mais l'élection de 1988 marqua un échec cuisant pour la droite, aucun de ses leaders ne faisant le poids face à l'habileté de Mitterrand. C'est la capacité de Chirac à retourner sa veste qui a finalement retardé les choses. Au mileu des années 90, Chirac a très bien senti qu'il n'accèderait au pouvoir que par une posture "modérée", que certains ont qualifié de "radical social". Les 12 années de sa présidence furent donc marquées par une valse hésitation entre une politique conservatrice dure et une politique radicale sociale de centre droit. Avec la disparition de ce dinosaure de la 4ème république, le champ était libre pour les libéraux. Au delà des aspects politiques, la situation française a aussi ses spécificités historiques. Ainsi Thomas Piketty a montré qu'en France, l'évolution de la part des haut revenus dans le revenu global est restée essentiellement stable après l'ffrondrement qui a suivi la première moitié du siècle. Aux USA, on observe au contraire une évolution plus forte avec un effrondrement plutot à la veille de la seconde guerre mondiale et une remontée à partir des années 80. Thomas Piketty attribue cette différence à des différences de conjoncture économiue et sociale. Je pense que d'autres facteurs historiques sont aussi à l'oeuvre. En effet, les lieux de naissance des trois révolutions économiques majeures du siècle étaient situé aux Etats-Unis: Boston et le moteur à explosion, New York et le moteur électrique, la Californie et le microprocesseur. Or chaque révolution économique tend à créer une nouvelle classe dominante, à redistribuer les cartes et donc à créer de l'inégalité. Ensuite, il faut se rappeler que l'Europe fut considérablement plus ravagée par la première guerre mondiale que les Etats-Unis ce qui explique que chez eux, la classe des super-riches put profiter d'une grosse part du gateau jusqu'à la veille de la seconde guerre mondiale là où les rentiers européens furent laminés entre 1900 et 1918. Mis à part le décalage temporel, ce qui s'est passé en France présente des analogies avec ce qu'on a observé en Allemagne, aux USA ou en Angleterre. Dans ce dernier cas, le thatchérisme est arrivé sur un terrain bien particulier qui se caractérisait par des difficultés économiques et sociales et un enlisement du modèle issu de l'après guerre (voir une synthèse historique). Basé sur le support théorique de l'l'école d'économie de Chicago, c'est donc sur le sentiment de frustration des sujets britaniques que le thatcherisme put s'installer. De manière similaire, le reaganisme s'installa après la guerre du Vietnam, dans une période marquée par des difficultés économiques et un effacement de l'optimisme des années 60. Reagan marqua la fin du cycle inauguré par Roosvelt et prolongé par tous les présidents qui lui succédèrent dont le très emblématique Kennedy. De la même manière en France, le Sarkozysme s'imposa après une période marquée par des difficultés économiques et sociales et une succession de gouvernements qui, à de très rares exceptions (Rocard puis Jospin 97-99) laissèrent un sentiment d'impuissance à renverser la tendance. Aucune de ces révolution n'aurait pu s'imposer avant les années 70-80. Après la seconde guerre mondiale, le temps était à la reconstruction (Europe) où à la reconversion d'une économie de guerre (USA) et tant que la génération des reconstructeurs était de ce monde, personne en dehors de quelques tours d'ivoire universitaires n'aurait pu imposer l'idée que le modèle social redistributeur de l'après guerre était ringard. Il fallut attendre que la génération d'enfants gatés des reconstructeurs pensent à autre chose qu'à leur libération sexuelle pour que le déchainement des frustrations se déploie. C'est dans ces frustrations et les aspirations au "toujours plus" qu'a pris naissance en profondeur le basculement de la société française qui a permi l'éléction de Sarkozy. Superficellement on pourrait penser que je fais caisse de résonance aux thèses de Guy Sorman. En partie seulement car si, comme lui, j'inscris la rupture Sarkozienne dans la filiation des révolutions conservatrices réagano-thatcheriennes, j'ai une analyse différente de leurs causes profondes et des perspectives historiques dans lesquelle cela s'inscrit. A suivre...
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Commentaires
P
Disons qu'on est dans une conception un peu "spéciale" de la République en ce moment...
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P
Pas sur que Sarkozy soit si libéral. Déconstruire l'état, ce serait comme casser son jouet et il s'amuse trop avec.<br /> Pour carricaturer (quoique...) ne s'agit il pas pour lui de mettre l'état au service de ceux qui le soutiennent, plutot que de déconstruite l'état ?
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