12 mai 2009
Comment sauver l'université ? (2/3)
Pour développer mon argumentaire, je commence par analyser la solution de Jean Robert Pitte:
L'orientation par la sélection à l'entrée de l'université me paraît être la seule option. L'université de médecine, par exemple, qui procède par numerus clausus, tire son épingle du jeu. D'autres secteurs s'en sortent bien également: la plupart des masters -surtout ceux professionnalisant-, les IUT, les écoles d'ingénieurs... En quelque sorte, tout ce qui offre un lien avec le monde de l'entreprise.
Les universités ne peuvent pas avoir accès à leur autonomie si elles ne choisissent pas leurs étudiants.
Je suis également favorable à une hausse du droit d'inscription, complétée par un système d'aides aux étudiants qui bénéficient de moins de moyens (bourses au mérite, prêts d'honneur, etc). La gratuité est finalement ce qu'il y a de plus antidémocratique dans notre système actuel.
Je n'aime pas être désagréable mais entre nous, c'est un peu la solution de facilité.. Yakafokon...
En clair, puisque le problème c'est la gestion d'une partie du public étudiant, ne les laissons pas entrer à l'université. Le problème c'est qu'en France, l'accès à l'enseignement supérieur est ouvert à tout titulaire du bac. Comme je vois mal une remise en cause de ce principe, qui va gérer la patate chaude des étudiants dont l'université ne voudra pas ?
Le fond du problème, c'est que cette idée de Jean-Robert Pitte ne sort pas des schémas traditionnels. Or dans notre paysage cloisonné entre universités, BTS, IUT, prépas, on arrive forcément à une hierarchisation de fait des diverses officines dont la grande perdante est l'université. Jean-Robert Pitte n'est d'ailleurs pas le dernier à se plaindre de la position défavorable des universités dans le mercato des étudiants...
Une voie de sortie compatible avec le bac comme sésame consisterait à sortir de cette logique d'officines hiérarchisées. Si les universités pouvaient proposer l'ensemble de l'offre pédagogique, de la prépa aux filières courtes en passant par des filières plus générales, elles pourraient en pratique effectuer une orientation en interne. Regroupant l'ensemble des personnels et des étudiants, elles seraient alors plus à même de faire évoluer les méthodes pédagogiques dans chacune de ces filières pour permettre aux étudiants de ne pas se planter bêtement. En clair, sortons de la logique de la rafinerie élitiste pour aller vers une logique de pépinière.
Mais évidemment c'est une solution plus difficile que de demander le droit de rejeter les étudiants dont on sent qu'ils demanderont un effort d'accompagnement pour réussir...
Quant à l'augmentation sur les droits d'inscription, c'est encore une fois un leurre. L'argent vient toujours de la même source: la richesse nationale produite.
En France, nous avons fait le choix de financer l'éducation en grande partie par l'impot. Cela a au moins un mérite: d'éviter que ne se développe un financement par l'emprunt. Le risque d'une hausse importante des droits d'inscription est en effet le report du cout de l'enseignement supérieur sur les générations suivantes... c'est ce qui s'est produit aux USA où les gens s'endettent souvent à vie pour leurs études. Mais une société ne peut vivre à crédit éternellement comme la crise actuelle nous le rappelle avec force. Bref, on peut augmenter raisonnablement les droits, remettre à plat le calcul des aides étudiantes, mais il ne faut pas attendre de miracle sauf à basculer sur un modèle fondé sur l'endettement privé.
Alors certes, il faut augmenter les ressources affectées à l'enseignement supérieur. Mais il ne faut pas céder aux sirènes de l'argent produit par le crédit (un crédit ca produit une dette, pas de la richesse) sans perdre de vue qu'il s'agit aussi d'effectuer une redistribution au profit des jeunes générations. Et surtout, cela ne dispensera pas d'une refonte en profondeur du paysage de l'enseignement post-bac pour sortir définitivement de la concurrence stériles entre officines.
En clair, on peut toujours réver mais les lendemains risquent de déchanter.
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