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After a year in Boston, entering an happy Apocalypse
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24 mai 2011

No future: chronique d'une crise intergénérationelle annoncée (2/3)

Suite de mon post précédent sur la crise de la jeunesse autour de la Méditerrannée...

Comme je l'ai implicitement dit, il serait naif d'amalgamer ce qui se passe dans les différents pays. Certes le dénominateur commun est extrèmement fort mais les divers pays concernés n'ont pas les mêmes problèmes.

Rive Sud de la Mériderrannée:

  • En Tunisie, la crise a explosé dans un pays soumis à un pouvoir autocratique, manipulant les élections et écrasant toute opposition. La soif de démocratie et de pluralisme politique a rencontré le désespoir d'une jeunesse plutot éduquée qui ne trouvait pas de débouchés professionnels. Evidemment la captation des ressources par l'oligarchie Ben Ali et la corruption ont freiné le développement économique de la Tunisie mais on peut aussi se demander si être le "bureau low cost" de la France était un choix pertinent comme le souligne un papier récent des Echos.
  • En Algérie, on trouve également un déficit démocratique très fort avec un gouvernement militaire installé à l'issue de la seconde guerre civile durant les années 90. Là aussi, on trouve une oligarchie corrompue qui organise la captation des richesses et entretient le manque de perspective d'une jeunesse démographiquement nombreuse. Mais étrangement, l'explosion sociale n'a pas été jusqu'au bout, c'est à dire jusqu'à une révolution et à un changement de régime. Peut être que le souvenir sanglant de la décennie 90 contribue à éviter l'embrasement mais il faut aussi se rappeler que l'Algérie dispose d'une manne financière non négligeable grâce aux hydrocarbures et que Bouteflika a proposé un agenda de réformes politiques avant que la température ne monte trop.

Sur la rive Nord de la Méditerranée, la situation est différente: il s'agit de pays nettement plus riches et qui tous ont des institutions démocratiques et une vie politique pluraliste, avec des alternances dans l'histoire récente. Cependant là aussi, on observe un manque de perspective de la jeunesse et des sociétés bloquées... 

Pour mémoire, Eurostat nous rappelle que, en février 2011: 

"En février 2011, le taux de chômage des moins de 25 ans s'est élevé à 19,4% dans la zone euro et à 20,4% dans l’UE27. En février 2010, il atteignait respectivement 20,5% et 20,9%. Les taux les plus bas ont été observés aux Pays-Bas (7,4%) et en Allemagne (7,9%) et les plus élevés en Espagne (43,5%) et en Grèce (36,1% au quatrième trimestre 2010)."

Pour aller plus loin, je me suis donc amusé à jouer avec les bases de données d'Eurostat et j'ai extrait les taux de chomages des moins de 25 ans au dernier trimestres 2006 et 2010, soit avant le tout début de la crise et maintenant.

Désolé de vous infliger cet horrible tableau en fin de ce post mais au moins vous avez les données... Voici quelques éléments frappants:

  • L'Espagne à la double palme: c'est le taux le plus élevé actuellement (43% des moins de 25 ans au chomage!) et c'est une des dégradations les plus spéctaculaires sur les dernières années car ce taux n'était que de 18% fin 2006.
  • Les Grecs ont le second "high score" avec un chomage des moins de 25 ans à 36% fin 2010 en partant de 25% en 2006. 
  • Les pays Baltes ont pris très cher: en Lituanie, le taux de chômage des moins de 25 ans est passé de 9 à 34% en quatre ans. En Lettonie, il est passé de 11 à 31% sur la même période. En Estonie de 11 à 26%... En Irlande il est passé de 8 à 30%!

Pour l'UE27 sur la même période, ce même taux est passé de 17 à 21%... En fait dans un certain nombre de pays, la situation du chomage des jeunes n'a pas connu une dégradation aussi spéctaculaire que dans le trio Espagne/Grèce/Irlande ou dans les pays Baltes. Ainsi en France, ce taux est passé de 21.9 à 22.2%...

Pour mémoire, les USA ont vu le taux de chômage des moins de 25 ans passer de 10 à 18% entre fin 2006 (l'explosion des subprimes s'est produite en 2007) et fin 2010.

Ce qui ressort finalement de ces données, c'est que la situation en Europe n'est pas homogène.

Il y a des pays qui ont connue une envolée de leur taux de chomage des moins de 25 ans spéctaculaire sur les 4 dernières années:  Espagne, Grèce, Irlande, Pays Baltes, Chypre et Danemark et à l'échelle mondiale les USA (si si!)... Et il y en a d'autres qui ont connu une évolution défavorable mais pas tant que cela: France, Belgique, Finlande mais ils partaient déjà d'assez haut. Et bien sur ceux qui ont eu une évolution dans le mauvais sens mais intermédiaire entre ces deux catégories: typiquement l'Angleterre et le Portugal. Enfin certains comme l'Allemagne, la Norvège et les Pays Bas restent encore bien au dessous du taux moyen de l'UE qui est à 21%...

Pour en revenir à ceux où ça chauffe, on peut trouver des différences au delà de ces données statistiques, principalement sur les faiblesses économiques structurelles:

  • En Grèce, c'est l'évasion fiscale, le sous investissement et une forme d'immobilisme structurel qui ont miné de pays depuis des années. 
  • En Italie, même problème probablement en pire... Les années de Berlusconisme ont également entrainé un véritable exode des cerveaux Italiens (il n'y a qu'à consulter la liste des recrutés au CNRS sur les 10 dernières années) ce qui est extrêmement inquiétant sur la capacité du pays à générer une nouvelle élite. Bref l'Italie c'est l'exode pour ceux qui peuvent et la survie sous solidarité familiale et économie souterraine pour les autres, le tout sous la coupe d'une gérontocratie politique (la moitié des hommes politiques y ont plus de 71 ans!).
  • En Espagne, le détonateur de la crise a été l'explosion de la bulle immobilière espagnole, laquelle est due à plusieurs facteurs dont en particulier une forme de corruption au niveau de l'urbanisme et la cupidité des banques. L'impuissance du gouvernement de gauche de Zapatero après celle de celui très à droite d'Aznar à prévoir puis à empécher la catastrophe, couplé à l'explosion du taux de chômage est à l'origine du mouvement de la jeunesse espagnol.

Alors quid de la France et des autres pays dans tout cela. Doit t'on envisager une extension du mouvement des jeunes espagnols en France ?

Pour cela il faut agréger ensemble facteurs économique, politiques et démographiques. C'est ce que j'essayerai de faire dans le dernier post de la série... (en attendant n'hésitez pas à commenter ou apporter votre propre analyse).

A suivre...

PS: Les données sur le chomage des moins de 25 ans par Eurostat:

 

TIME 
GEO 
2010Q4
 
2006Q4
 
Espagne
43.1
18.0
Grèce
36.1
25.5
Lituanie
34.2
9.1
Slovaquie
34.0
23.6
Croatie
32.3
27.2
Lettonie
31.1
11.1
Irlande
30.3
8.0
Italie
28.3
20.4
Estonie
25.9
10.9
Bulgarie
25.8
17.2
Hongrie
25.7
19.8
Pologne
24.2
27.1
Suède
23.7
20.1
Roumanie
23.0
21.6
France
22.2
21.9
Portugal
21.9
17.0
Belgique
21.3
20.0
Union européenne (27 pays)
20.9
16.8
Finlande
20.9
18.1
Zone euro (16 pays)
20.3
16.3
Royaume-Uni
20.2
14.0
Chypre
19.1
9.7
Turquie
18.9
16.2
États-Unis
18.3
10.4
République tchèque
17.2
15.1
Luxembourg
16.1
16.2
Slovénie
14.2
11.1
Danemark
14.1
7.4
Malte
12.2
14.9
Allemagne (incluant l'ancienne RDA à partir de 1991)
9.1
13.0
Norvège
8.9
7.5
Pays-Bas
8.3
7.1
Autriche
8.0
8.

 

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Commentaires
P
Oui en fait en France le chômage des jeunes semble avoir peu bouge mais attention car cela ne veut pas dire que globalement la France ait bien encaisse le choc! Mais effectivement du coup je serai un peu étonne d'un mouvement de la jeunesse rn France la maintenant...
Répondre
O
C'est formidable d'avoir moins de 26 ans. :(
Répondre
P
...de tous les pays qui ont subi une forte hausse du chomage des jeunes (USA compris), <br /> c'est qu'ils ont ete fortement touches par la recente crise financiere.<br /> En France, heureusement, on s'en est mieux sortis que certains.
Répondre
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